Ah. La tuile. Soyons francs, c’est quand même bien plus pratique quand on nous demande le dessert. On connait tous une petite pâtisserie qui fait un millefeuille à tomber ou une forêt noire au top. Ou même mieux, une bonne recette bien maîtrisée et qui a fait ses preuves. Malheureusement, pour le vin, c’est une autre paire de manches.
Bien évidemment, vous connaissez deux-trois valeurs sures, mais si il faut sortir un Pessac Leognan à chaque repas de famille, ça va commencer à être compliqué de se voir tous les dimanches…
Du coup, vous vous retrouvez encore une fois au rayon “vins” de votre hypermarché, à regarder les dizaines de bouteilles sans vraiment savoir quoi chercher. Une jolie couleur, une étiquette bien travaillée, un flacon à la forme atypique… Comment savoir ce que vous avez sous les yeux?
Jolie bouteille, sacrée bouteille…
Bonne nouvelle pour vous, avec la bouteille en main, vous pouvez déjà vous faire une bonne idée des caractéristiques de son contenu. Pour être plus précis, vous pouvez trouver sur une bouteille de vin deux sources d’informations : l’étiquette (contre-étiquette incluse) et la capsule-congé (appelée capsule-CRD pour le modèle français).
L’étiquette comporte un certain nombre de mentions obligatoires ou non, qui peuvent orienter votre choix. Tout d’abord, la classification : AOP, IGP ou vin de France. La différence entre ces trois là? Le cahier des charges n’est pas le même (celui des deux premier étant bien plus strict, particulièrement l’AOP). Et donc? C’est tout. Non, non, je suis sérieux, c’est tout. Je sais, certains vieux de la vieille argueront que l’appellation c’est quand même une garantie de qualité. Et je répondrais que c’est aussi un gage d’immobilisme et de frein à la créativité du vigneron.
Le débat fait rage dans le monde du vin quant à la valeur actuelle des appellations, et je compte bien y consacrer au moins un article à part entière. Aussi, je ne développerai pas plus mon avis pour le moment (ça me fait mal d’attendre tant le sujet me tient à cœur, mais j’essaie de soigner ma tendance à digresser alors soyez cool et filez moi un coup de main). Pour fermer cette parenthèse, je conseillerai à ceux qui considèrent les AOC comme les seules appellations “valables” de se procurer une bouteille de “Terre d’Amandier” (IGP Ardèche en Chardonnay) ou d’Iranja (Domaine Camin Larredya, une pure merveille de vin de France du Piémont pyrénéen).
Mentions obligatoires
Vous trouverez parmi elles la contenance (1) de la bouteille (oui, oui, on s’en fout dans notre cas), la teneur (2) en alcool (toujours bon à savoir pour pas retrouver Mémé qui danse la carioca dans le poulailler), le pays producteur (3) si le vin est destiné à l’exportation, le logo à destination des femmes enceintes (4), le numéro de lot (5), la mention “contient des sulfites” (6) le cas échéant, et enfin et surtout, les nom et adresse de l’embouteilleur (7).
C’est cette dernière information qui nous intéresse. En effet, selon celle-ci, vous pourrez savoir où et par qui le vin a été embouteillé, ce qui selon le cas peut être un critère de sélection (et surtout d’élimination). En effet, on a eu l’exemple notamment de certains vins du Languedoc (je pense à une IGP Cité de Carcassonne que j’avais goûté en salon) embouteillés dans les Deux Sèvres (pas super frontalier), avant d’approvisionner les grandes surfaces de la cité médiévale!! A l’heure du retour à la nature et à l’authenticité des produits, j’aurais tendance à éviter ce genre de production.
Mentions facultatives
Elles sont nombreuses et souvent très utiles au consommateur (d’ailleurs plus, à mon sens, que les mentions obligatoires…). Vous pouvez trouver le millésime (année de récolte), le nom de la cuvée, les mentions d’élaboration : “vendanges manuelles”, “vieilli en fût de chêne”, “vielles vignes” (à noter que cette dernière n’a aucune valeur en soi car aucun contrôle n’est fait). Vous pouvez également trouver l’indication de la couleur du vin (au cas où), ainsi que les cépages. Et c’est grâce à cette dernière que je considère les mentions facultatives plus utiles que les obligatoires.
Un cépage, quésaco? Il s’agit tout simplement de la variété des raisins (plus précisément des vignes) dont est issu le vin. On distingue généralement les cépages blancs et noirs (et non pas rouge comme on le lit souvent. En France le seul cépages rouges sont le Cardinal rouge et le Velteliner rouge précoce rosé) dépendamment de la coloration de la peau des raisins. Encore une fois, je vais passer beaucoup de temps à parler des cépages, je ne rentrerai donc pas dans le détail ici. Je tiens toutefois à dire que je suis un fervent partisan de l’approche de la dégustation à l’anglo-saxonne qui se base sur les cépages plutôt que les appellations (à la française). Et pour cause, je pense que pour le consommateur non initié, il est plus simple de mémoriser le goût du chardonnay que celui du Bâtard-Montrachet par exemple.
Prendre congé
Vient ensuite la capsule-congé. Il s’agit du “sceau” (souvent en aluminium) apposé sur la bague de la bouteille (la partie à son sommet). Le modèle français, appelé capsule CRD, est reconnaissable à la Marianne en son centre. Vous trouverez tout d’abord sur ce sceau le numéro (1) du département de l’embouteilleur. Celui-ci sera utile pour vérifier que le vin a été embouteillé dans sa région de production (et éviter ainsi notre charmant Carcassonnais des Deux-Sèvres).
Dans un second temps vous pourrez remarquer une lettre inscrite juste après le numéro (2). Il en existe 3 possibles : R, E ou N. Le R indique que l’embouteilleur est également le récoltant. C’est une garantie que le raisin n’a pas subi un long transport et que le vin a été élaboré intégralement par le producteur, qu’il s’agisse d’un vigneron indépendant ou d’une coopérative. Si certaines maisons de négoce jouissent d’un certain prestige et produisent des vins d’une qualité indiscutable (Louis Jadot en Bourgogne ou Paul Jaboulet dans les Côtes du Rhône, par exemple), la plupart des vins estampillés N ou E dans le commerce révèlent un rapport qualité-prix très mauvais.
A noter que certaines coopératives utilisent la lettre N car elles rachètent du raisin ou du vin à des viticulteurs non affiliés. Le troisième nombre (3) que vous pouvez trouver sur la bouteille correspond au numéro administratif d’agrément de l’embouteilleur et ne vous apportera aucune information utile.
Bon, je vous parle de la CRD depuis un moment, mais il faut quand même noter que cette capsule ne sera bientôt plus obligatoire (à partir du 1er Juin 2019 pour être précis). Du coup, est-il bien utile de vous en parler? En fait oui, pour la simple et bonne raison que sa suppression sur certaines bouteilles ne se fera qu’au profit d’une capsule neutre mais surtout d’un DSA (Document Simplifié d’Accompagnement) qui correspond aux normes européennes.
Ainsi, les grandes maisons et groupes viticoles passeront sans doute tous à ce type de titre afin de simplifier leur circuit d’embouteillage (toutes leurs bouteilles suivront ainsi les même étapes). Cependant, les frais provoqués par un changement de certification vont certainement dissuader les plus petit producteurs, ceux qui ne s’intéresse qu’au marché national. On peut donc s’attendre à voir perdurer la capsule CRD sur un grand nombre de bouteilles proposées dans le commerce.
À vous maintenant!
Oui, mais attendez un peu ! Je vous ai donné quelques infos, quelques pistes pour trouver la bouteille qu’il vous faut. Dans mon premier article, je me suis également lancé un défi (l’obtention des niveaux 1, 2 et 3 du WSET d’ici la fin de l’année. Alors aujourd’hui, c’est à chacun d’entre vous que je souhaite lancer un défi. Et même deux ! Oui, c’est beaucoup demander, mais après tout, si je me propose de vous aider à mieux connaître et apprécier le vin, autant ne pas me limiter à vous filer des infos. En plus, vous allez voir que ce que je vous demande (ou plutôt ce que je vous encourage à faire) n’est pas bien sorcier.
Premier défi : La prochaine fois que vous souhaiterez acheter une bouteille de vin, tentez la chose suivante. Plutôt que de passer au rayon liquide (oui, c’est comme ça que ça s’appelle, et c’est dire le niveau de spécialité) de votre supermarché, allumez votre ordinateur (ou smartphone), ouvrez votre navigateur internet et tapez tout simplement “caviste *votre ville*”. Puis laissez vous guider (pour ceux qui n’ont pas de cave près de chez eux, profitez d’un trajet en ville pour faire un petit détour!).
Attention, l’exercice ne s’arrête pas là! Lorsque vous entrerez dans la boutique, ne vous contentez pas de slalomer entre les étagères en parcourant des yeux les bouteilles alignées. Vous avez près de vous un professionnel du vin, qui a souvent constitué lui-même le stock de son établissement et sans doute goûté la majorité des vins que vous avez sous les yeux. Parlez avec lui (ou elle), demandez lui conseil, n’hésitez pas à définir dès le début un budget et laissez-le vous faire découvrir ses perles de flacons que vous ne trouverez sans doute pas en grande distribution. Le budget est souvent légèrement plus élevé qu’en supermarché, mais vous pouvez vous en tirer à moins de 10-15€ avec un qualité et des conseils de dégustation que vous ne regretterez pas.
Second défi : Combien d’entre vous ont un smartphone? L’immense majorité, sans doute. Parmi les autres, combien ont un téléphone permettant d’enregistrer des brouillons de SMS? Presque tous. Et pour ce qui est des derniers remparts contre l’électronique, vous ne verrez sans doute pas d’inconvénient à garder dans votre veste un petit carnet et un crayon. Bref, tout le monde est prêt à prendre des notes? Alors faites-le. Non non, pas sur ce que je vais vous dire, sur ce que vous buvez!
Lorsque vous goûtez un vin, notez rapidement ce qu’il vous inspire. Inutile de faire une analyse complète, il suffit de noter si le vin vous plait, si il est trop puissant, ou au contraire trop léger, si les tanins vous agressent, etc. “Bouarf, de toute façon je ne relirai jamais ces notes alors à quoi bon…”. Quand j’ai passé mes certifications de formateur, on m’a toujours dit que l’être humain retenait 70% de ce qu’il disait mais 90% de ce que l’on écrit (ou enseigne). Peu Importe que vous ne relisiez pas ces notes, tant que vous les prenez, elles s’imprimeront dans un coin de votre cerveau. Ainsi, vous vous surprendrez dans quelques temps de penser après une première gorgée d’un nouveau verre “tiens, il est pas mal, il me fait penser au Sancerre de Noël” (oui, un Sancerre pour un repas de Noël ça peut tout à fait le faire ! ).
Je sais que la plupart d’entre vous ne relèveront pas ces défis, ou prendront leurs notes une fois, deux fois, et abandonneront… Mais sachez qu’il ne faut pas plus que quelques habitudes comme celles que je vous propose de prendre pour acquérir un grand savoir et une grande aisance dans le domaine du vin. Qu’est-ce que cela vous coûte d’essayer?
C’est clair que c’est carrément la tuile quand on me demande ça! Merci pour tes conseils, je saurai un peu mieux choisir parmi toutes ces bouteilles qui se ressemblent dans les rayons.
Merci Marie !
Ravie de pouvoir aider 😉