novembre 27

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Étudier le vin : pourquoi ?

By Arthur Communal

novembre 27, 2020


Franchement, est-ce que ça en vaut la peine? 

Le vin, ça se passe dans la bouche, non? Ni dans les livres, ni dans les blogs, mais dans le verre. 

Alors ça sert à quoi de lire, d’écrire, d’étudier le vin? Finalement, ça sert à quoi d’apprendre tous ces termes et ces noms ?

L’utilité du vocabulaire

Très sincèrement, c’est une sacrée bonne question. Pourquoi étudier le vin? 

Est-ce qu’on ferait pas mieux de juste déguster encore et encore, histoire d’absorber tout ça (la connaissance, pas le vin) sur le tas? 

Ça parait pas idiot, dit comme ça, hein? Le problème, c’est que ça occulte une composante essentielle de la dégustation : le partage. 

Le vin tout seul, ça vaut pas le coup

Je ne veux pas dire qu’il faut absolument se faire une grosse soirée ou un repas gargantuesque pour ouvrir une bouteille. Certains vins donnent le meilleur d’eux même quand ils sont dégustés seuls, sans accompagnement. On appelle ça des vins de méditation. 

Mais il faut bien admettre que même dans ces cas là, il y a une idée de partage derrière. D’abord parce que c’est toujours plus agréable d’être accompagné pour ces « méditations ». 

Et aussi parce que l’objectif d’une dégustation est de tirer quelque chose de cette expérience. Un avis, un plaisir, des sensations. 

Voire même plus. Pouvoir partager ce que vous avez ressenti. 

Combien de fois avez-vous ressenti cette excitation après avoir goûté un vin? Ou un plat, ou terminé un livre ou un jeu qui vous a retourné le cerveau?

Cette envie furieuse de raconter ça à un proche, de lui transmettre ce que vous avez ressenti. 

C’est ce qui manque à tout ça. Le partage. 

Parce que partager ce que l’on ressent, c’est le graver dans notre mémoire, lui donner une durabilité, l’inscrire dans le temps, le rendre immortel. 

Pour partager, il faut parler

Plus encore. Vous avez déjà essayé d’apprendre une chose à un ami? De transmettre une de vos passions, un hobby ou un passe temps. 

Ca peut être n’importe quoi : un genre littéraire (« Non, vraiment, commence par lire le Necroscope et dis moi ce que tu en penses. Lovecraft est un génie! »). 

Ca peut être un sport : « Moi aussi ça me paraissait un peu naze, mais il faut absolument que tu viennes faire au moins une partie de curling avec moi! Tu vas voir, c’est génial! »

Et bien évidemment, ça peut être … le vin : 

« J’ai goûté un truc de fou. Un petit vin italien du feu de Dieu! 

– Boh, tu sais, les vins étrangers…

– Ah non, je te jure, c’est vraiment trop bon. Il est super doux.

– Ah mais c’est un vin sucré?

– Euh, non, c’est un rouge. Mais pas sucré. C’est un sec, même plutôt costaud, mais assez doux en même temps.

– Euh comment ça?

– Euh, ben… aaaaah, je sais pas comment t’expliquer. »

La tête de ton pote après tes explications

Et bim. On y est. La raison précise qui fait que c’est utile d’apprendre le vin. 

Ok, je dramatise un peu. UNE des raisons qui font qu’il est utile d’apprendre le vin. Apprendre la théorie, j’entends. 

Si le vocabulaire existe, c’est qu’il y a une raison. 

Et cette raison, l’utilité d’un vocabulaire spécifique, c’est de pouvoir exprimer ses idées clairement, être capable de transmettre ce que l’on ressent et se faire comprendre. 

Concours des vins d’Avignon

Dans les concours, quand on juge des vins, on est pas seuls.

 On parle, on débat, on discute. On partage nos ressentis sur les échantillons. 

Je suis pas forcément un adepte absolu des concours – j’en parlerai d’ailleurs prochainement – mais ça met tout de même les choses en perspective. 

Pourquoi la théorie est indispensable

Je suis pas un fanatique de la théorie, quelque soit le domaine. 

Les cours magistraux me saoulent. Les bouquins théoriques aussi. 

Mais j’ai bien été forcé de constater qu’elle est indispensable quand on veut progresser dans sa connaissance du vin. 

Vous pouvez passer autant de temps que vous voulez à déguster dans votre coin, à écumer les vignobles de France (et d’ailleurs) et à prendre des notes improvisées. Vous n’avancerez jamais aussi vite qu’en structurant vos expériences, vos impressions, et en les consolidant avec la trame solide des connaissances.

Être sélectif dans son apprentissage

Soyons clairs : je ne vous dis pas qu’il est nécessaire d’apprendre la liste des producteurs de champagne. Ni même de retenir la liste des Grands Crus Classés de Bordeaux de la classification de 1855 

Les sommeliers le font généralement. Et c’est chiant.

Non, ce que j’entends par connaissances, c’est plutôt tout ce qui pourra aider votre compréhension. Tout ce qui pourra vous épauler dans la pratique. 

Et même si je sais que ça paraît énorme comme masse de connaissances à ingurgiter au premier abord… bah c’est pas si terrible, en fait. 

Vous savez comment on mange un éléphant? Une bouchée à la fois. 

Ne songez pas à tout savoir dans un mois. D’abord vous n’y arriveriez pas. Et surtout vous vous dégouteriez de cet apprentissage en essayant. 

Commencez par les bases. 

Le vin c’est quoi? 

Comment on le fait? 

C’est quoi un cépage? C’est quoi les tannins? Comment on fait un accord met-vin? Comment on fait pour déguster? 

Le plus souvent, je conseille de lier l’apprentissage à votre expérience personnelle.

Partir de soi

Partez de ce que VOUS aimez. Généralement, on va pas se mentir, c’est souvent lié à votre région. 

Il est pas beau, le Saint-Joseph?

J’ai grandi à côté de Valence, je peux vous assurer que j’ai passé la plus grande partie de ma vie à être absolument persuadé que rien n’égalait le Saint-Joseph et que les vins de Bordeaux étaient d’infâmes piquettes (merci maman).

Et c’est normal. Parce que le palais (et le cerveau) s’habitue à ce qu’on goûte le plus. 

Il s’adapte aux caractéristiques des vins qu’il rencontre le plus et en fait la « normalité ». Du coup tout ce qui sort de ce cadre devient bizarre, dissonant. 

Exemple concret

On va tenter un petit exercice, histoire de voir tout ce que vous pouvez comprendre rien qu’en partant de vous et de ce que vous aimez. 

Imaginons donc que vous soyez un fan de Bordeaux, avec un petit faible pour les vins du Médoc. 

Sans connaissance, vous vous direz juste qu’il vaut mieux que vous achetiez des Saint-Julien et des Margaux quand vous passez au rayon vin. Oui, on part du principe que sans connaissances, on achète son vin en grande surface. C’est cliché, mais bon…

Essayons maintenant de réfléchir avec un niveau de connaissances au dessus. On peut supposer sans trop de doute que vous aimez le Cabernet Sauvignon, puisque c’est le cépage majoritaire des vins du Médoc.

En partant de là, on se pose la question de CE que vous aimez dans ce cépage. Est-ce le côté tannique? Les arômes (de fruit noir par exemple)? Peut-être préférez-vous les vins structurés?

Cabernet Sauvignon dans la Napa Valley

Si vous avez du mal à répondre à ces questions, c’est peut-être que vous avez besoin de passer au niveau supérieur. 

Comment savoir si vous aimez les vins tanniques? Trouvez un Médoc que vous appréciez et cherchez un vin issu du cépage nebbiolo de la même année (appellation Barolo ou Barbaresco). Si il vous plaît, il y a de fortes chances que vous soyez amateur de tannins. 

Comment savoir si vous aimez les arômes primaires du cabernet sauvignon? Comparez avec un vin avec un niveau de tannin équivalent dominé par d’autres arômes comme le malbec (appellation Cahors). 

Peut-être est-ce plutôt l’apport de l’élevage en fût, très courant dans le médoc, qui vous plaît? On parlera alors d’arômes tertiaires comme la vanille ou la réglisse. Encore une fois comparez avec un cabernet élevé en cuve métal ou béton (adressez-vous à un caviste, c’est le plus simple).

Enfin, il vous sera utile de comparer à la dégustation, des vins similaires en termes de composition et d’élevage mais sur des millésimes différents. Le vieillissement est un facteur fondamental, notamment pour les vins issus du cabernet sauvignon. 

Le niveau encore au dessus (à mon sens) serait de savoir si vous préférez 

  • un vin issu d’un sol argileux comme sur l’appellation Saint-Estèphe qui donnera du gras et du volume au vin, renforçant ses tannins
  • ou un vin issu d’un sol plus sableux comme à Margaux, qui sera sur un profil plus fin et subtil. 

Tout ça parce que vous aimez bien les Médocs. Pas mal, non? 

Ok, maintenant que je vous ai bien motivé à apprendre… par où commencer? Comment acquérir les fameuses bases dont je vous parle? 

Franchement… c’est à vous de voir. C’est vrai, aujourd’hui toutes les infos sont disponibles, à portée de main, ou de clic. 

Vous pourrez très bientôt trouver sur le blog un article avec les médias vin que j’aime suivre. Pour aujourd’hui, je me concentrerai donc plutôt sur un support un peu plus classique : les livres !

Mes 4 livres vin préférés 

Des livres sur le vin, vous en trouverez des dizaines, voire plus, dans n’importe quelle librairie un peu généraliste ou sur n’importe quel site de vente. 

Ici, je vais vous donner MES chouchous, ceux que je conseille pour débuter et pour continuer l’apprentissage du vin.

Pour la plupart, ce sont des bouquins que j’ai à la maison dans ma bibliothèque ou sur mon appli Kindle. 

Pour les autres, ce sont des livres que j’ai eu l’occasion de lire sans pour autant les avoir chez moi, mais qui m’ont suffisamment marqué pour que je vous en parle. 

Le vin c’est pas sorcier

Pour commencer, je conseille toujours d’éviter de se prendre la tête. Donc on oublie les gros ouvrages pleins de concepts techniques et on se tourne vers du simple, du sympa, et du bien illustré. De mon côté, j’ai opté pour ce livre écrit par Ophélie Neiman, autrice du blog Miss Glouglou.

Le livre est sous-titré “Petit précis d’œnologie illustré” et… c’est exactement ça. Ophélie Neiman aborde le vin en parlant tour à tour de soirées vin, de dégustation, de viticulture avant de parler des vignobles, des accords mets-vins et enfin de l’achat du vin. 

C’est clair, bien illustré (mention spéciale à Yannis Varoutsikos pour les dessins) et très complet. Et en plus ça se lit tout seul. Franchement très bon.

50 Notions essentielles sur le vin

Alors oui, le titre fait un peu académique. Mais en fait c’est très lisible, chaque notion est abordée en une double page et environ 300 mots. Donc en trois minutes c’est fini. 

À coup d’une double page par jour, vous aurez – en moins de deux mois – abordé l’essentiel des concepts utiles quand on veut apprendre le vin. Pas mal, non? 

Après, il en existe un paquet des bouquins de ce genre. Alors pourquoi ai-je choisi celui-là? 

Simple. Il a été écrit par feu Gérard Basset, le boss final de la sommellerie mondiale. Son C.V? Wine MBA + master sommellerie + Meilleur sommelier du monde + Master of Wine. 

*mic drop*

Le vin super facile

Wine Folly est un site étatsuniens spécialisé dans le vin depuis presque 10ans. Ses créateurs, Madeline Puckette et Justin Hammack ont écrit en 2015 un livre (réédité en 2020) intitulé “Le Vin Super Facile” (dans sa version française). 

Je sais que ça pique pour pas mal de Français de passer par les USA pour apprendre le vin, mais… C’est un très bon bouquin, fait par des passionnés, pour les passionnés!

A noter qu’une sorte de “tome 2” a été publié sous le titre de “The Master Guide”. C’est tout de même d’un niveau plus avancé et je suis pas sûr qu’il existe en français. Je cherche encore …

Le Goût du Vin

Si Gérard Basset était le boss final des sommeliers, Émile Peynaud était celui des œnologues. Il a littéralement révolutionné les techniques de vinifications au siècle dernier.

La sélection au terroir, c’est lui qui l’a mise en place. La popularisation de la fermentation malolactique (ou la “malo”), c’est lui aussi. 

Avec son ami – et élève – Jacques Blouin il a publié en 1983 “Le Goût du Vin”, considéré à l’heure d’aujourd’hui comme l’ouvrage de référence dans le domaine de la dégustation. C’est l’un des premiers livres sur le vin que je me suis offert et il reste toujours sur le devant de ma bibliothèque. 

Étudier pour comprendre

Franchement, est-ce que ça en vaut la peine?

Oui. 

Oui, ça vaut la peine de prendre un peu de temps pour lire. 

Pour garder dans un coin de son esprit les arômes de ses cépages préférés. 

Pour noter les apports de la fermentation carbonique. 

Pour se souvenir plus tard de ce qu’on aime. 

Pour apprendre les mots du vin. 

Pour être capable de partager ce qu’on ressent, de partager cette passion. 

Pour comprendre, aussi. Comprendre pourquoi on préfère telle quille, tel producteur, telle appellation. 

Parce que dans le vin, plus on comprend, plus on prend son pied à la dégustation.

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Arthur Communal

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    1. Effectivement, quelques bases suffisent pour l’usage quotidien. Le risque c’est surtout de plus pouvoir s’arrêter dans l’apprentissage 😉
      Moi, je suis tombé dedans…

  1. C'est vrai que le vin fait partie de notre culture et que d'en connaitre au moins les fondamentaux permet même dans le monde entier d'avoir des discussions intéressantes.

    Sans être un spécialiste on peut mieux comprendre ce que l'on boit d'autant plus que ça explique un peu l'histoire d'un terroir.

    Merci pour cet article

    1. Effectivement le vin fait partie de la culture française, mais il reste très obscur pour beaucoup d’entre nous.
      Je pense que le monde du vin souffre d’une image élitiste et pompeuse. C’est assez triste, quand on dit que c’est un outil de partage et d’échange.

      A nous de changer ça !

  2. Je suis contente d'être tombée sur cet article ! On sent vraiment la passion dans ton partage. Moi qui trouvais que ça avait l'air compliqué à apprendre, expliqué comme ça, j'avais juste l'impression d'une discussion…autour d'une bonne bouteille justement. Et c'est vrai que de pouvoir mettre des mots sur ce qu'on sens ou ressens permet de mieux apprécier le moment. Le vin est fait d'émotions finalement 🙂

    1. C’est bien plus facile à faire que beaucoup le pense. A mon sens le vin fait partie de ces connaissances « easy to know, hard to master » comme disent no copains d’outre Manche. Mais on peut vraiment s’éclater avec une base facile à acquérir.

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